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Ida B.

La Critique : Born in the wild (2024)

Tems est née à la lumière des bougies : « Il n’y avait pas d’électricité quand ma mère m’a mise au monde. (…) C’était la nuit dans ma vie si longtemps que je pensais que la lumière ne viendrait jamais. » a-t-elle confié à NPR. Vingt-huit ans plus tard, l’artiste nigériane lauréate d’un Grammy se retrouve sous les projecteurs mondiaux. Born in the Wild revisite les ombres avec clarté et confiance.




Dans ses premiers EP, la chanteuse afro-fusion dévoilait ses prouesses envoûtantes ; avec son premier album, elle se réaffirme comme une productrice imaginative et l’autrice de sa propre légende.


Tems reste la seule autrice de ses chansons, confrontant les pressions de la célébrité à travers une exploration tendre et mélancolique des traumatismes d’avant la gloire. Chaque chanson évoque un kaléidoscope d'émotions, mais que ce soit en s'adressant à une puissance supérieure avec « Me & U » ou en réfléchissant sur une romance malheureuse dans « Unfortunate », Tems reste concentrée sur la gratitude.


Sur l’introduction acoustique guidée par la guitare et la chanson-titre, sa voix émerge comme si elle chantait près d'un feu de camp mourant, le piano scintillant dans le ciel au-dessus.



Distillant sa musique à son essence, Born in the Wild opte pour une ambiance dépouillée des années 90, offrant à Tems la sérénité nécessaire pour explorer ses pensées les plus intimes. Tems a autoproduit une grande partie de l'album aux côtés de GuiltyBeatz, le DJ ghanéen d’afropop derrière son EP If Orange Was a Place (2021). Le paysage sonore polyrythmique, orné de tonalités terreuses de tambours conga, de carillons éoliens et de hochets shekere, contrebalance le son homogénéisé de l’afropop contemporain.


Dans des chansons comme « Love Me JeJe » et « Gangsta », qui interpole Diana King, elle marie la musique africaine vintage avec le R&B moderne, le dancehall et la pop, écrivant une lettre d'amour au passé et un message pour l'avenir. D'ailleurs, « Love Me JeJe » est une mise à jour scintillante du classique du chanteur nigérian Seyi Sodimu : “Tous les anciens au Nigeria adorent cette chanson”  confie la chanteuse.



« Wickedest » contient un sample de « 1er Gaou » du quatuor ivoirien Magic System - tube zouglou iconique du début des années 2000 qui déclenche des souvenirs pour tous les Africains, du continent et de la diaspora.



Les arrangements épurés de Tems donnent une impression de vintage et de vécu. Accompagnée du guitariste de jazz fusion Nsikak David sur « Boy O Boy », elle évoque une ambiance de solitude aussi luxueuse qu’un salon d’hôtel enveloppé de velours.


Sur « Forever », produit par le duo brummie DAMEDAME* - mais qui sonne comme une groove de Kaytranada, - le timbre grave de Tems s’élève à un falsetto léger rappelant le jeune Michael Jackson.




Le poids lourd de l’afrobeats Sarz produit « Get It Right », un morceau amusant d’amapiano avec Asake, mais le vernis commercial de la chanson perturbe le clair-obscur étudié de l'album. On aurait préféré entendre le single « Not an Angel », une autre production de Sarz qui n’a étonnamment pas été retenue pour l’album.



À travers 18 morceaux généreux, Born in the Wild a l’air d’un tableau d’humeur tentaculaire, incorporant le sous-courant de la foi chrétienne de Tems, les cadences mélismatiques qui reflètent sa confiance en elle fluctuante, et des refrains qui brouillent affirmation et réflexion. Les interludes, comprenant des extraits de sa mère et de ses managers, semblent toutefois un poil trop longs ou trop récurrents.




Born in the Wild est une lente montée en puissance qui récompense la patience. La chanson de clôture « Hold On » ressemble à la lumière au bout du tunnel. Dans ses précédents projets, Tems fuyait l’obscurité. Dans Born in the Wild, elle fait la paix avec sa permanence.

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