2024 s'annonce comme une année mémorable, propice à la découverte de talents innovants et inspirants. Parmi la pléthore de créateurs émergents, nous avons sélectionné avec soin dix esprits visionnaires qui se distinguent par leur parcours exceptionnel et leur travail remarquable. Découvrez les 10 créateurs à suivre de près cette année.
Sophia Roe et Charlotte Eskildsen - The Garment
Sophia Roe, styliste, et Charlotte Eskildsen, directrice créative, ont uni leurs forces pour créer The Garment. La marque danoise de pièces intemporelles se revendique comme une plateforme audacieuse qui mélange la mode et la conscience sociale. La force de la maison réside dans la magie entre l’univers monochrome de la marque et l’héritage design de la directrice créative Charlotte Eskildsen.
Le duo créatif à la tête du jeune label The Garment a relevé le défi audacieux de transposer l'essence de Los Angeles à Copenhague. Leur marque incarne l'excellence de la mode scandinave, caractérisée par des coupes impeccables, des créations au crochet épousant la peau, des jeux de volumes, et une esthétique épurée distinctive. Tout en préservant cette signature épurée, Sophia Roe et Charlotte Eskildsen ont insufflé une touche de fantaisie inspirée de Los Angeles.
Un an après leur premier défilé, elles dévoilent pour la saison printemps-été 2024 une collection élaborée, mêlant habilement jeux de volumes et textures. Cette nouvelle ligne marie avec harmonie la douceur du crochet et de la dentelle à la rigueur d'un tailleur parfaitement ajusté. Au cœur de cette collection, un motif récurrent : le nœud, qui s'invite tant sur les pièces de prêt-à-porter que sur les chaussures, conçues en collaboration avec Gia Borghini.
Alain Paul
Alain Paul, le jeune designer de 34 ans, a présenté son premier défilé sous son label éponyme au prestigieux Théâtre du Châtelet, en marge de la Fashion Week de Paris. Après une année à concevoir ses créations, il est entré de manière remarquable dans l'arène de la mode. En 2013, il rejoint l'aventure VETEMENTS aux côtés de Demna. Collaborant avec l'emblématique directeur artistique, désormais à la tête de Balenciaga, Alain Paul a appris l'art de concevoir et de construire un vêtement de A à Z. Quatre ans plus tard, il rejoint le studio de Virgil Abloh chez Louis Vuitton. "J'ai appris la liberté avec Virgil", souligne-t-il, accompagnant le créateur américain jusqu'à sa mort soudaine en novembre 2021. La disparition du directeur artistique a été le catalyseur pour Alain Paul, le poussant à voler de ses propres ailes. Avec son mari et associé, Luís, ils ont fondé leur propre marque en quelques mois. Fort d'une vaste expérience dans le secteur notamment grâce à son parcours chez colette, Luís prend en charge la partie commerciale, tandis qu'Alain se concentre sur la créativité.
Il est rare de voir une maîtrise aussi précise des techniques de création et du savoir-faire dès la première collection. Alain Paul sait parfaitement ce qu'il fait, comme en témoigne son tailoring impeccablement construit, s'inspirant de la garde-robe traditionnelle du danseur. Les pantalons pour hommes, par exemple, trouvent leur origine dans les gaines de danse, tandis que les justaucorps se transforment en nouveaux tops tendances. Les chaussures mixtes et colorées sont conçues à partir des chaussons de danse, reprenant leur forme caractéristique carrée à l'avant. Les matériaux abondent (denim, cuir, satin) et se combinent à l'infini pour créer des vêtements uniformes et hautement élégants. Les épaulettes des vestes de costumes sont larges, évoquant les clavicules saillantes des danseurs, et le layering prévaut avec le noir comme fil conducteur sur la plupart des silhouettes.
Vincent Garnier Pressiat
Jeune créateur à la tête de sa propre marque, Pressiat, il a lancé son label pendant le premier confinement en 2020, explorant diverses inspirations telles que le glam rock, le night-clubbing, les années 20 et le romantisme. A l'âge de vingt-six ans seulement, Vincent Garnier Pressiat a forgé une identité forte et assumée, mûrie au fil des années. Originaire de Besançon, c’est auprès de sa mère - qui fut couturière pour de grandes maisons parisiennes avant de devenir professeure - que le jeune homme s’est pris d’amour pour la mode. Diplômé de l'École de la chambre syndicale de la couture parisienne, il a attiré l'attention de John Galliano, directeur artistique de Maison Margiela, puis des maisons Saint Laurent et Balmain avec sa vision subversive et authentique. Épaulé par son meilleur ami, Victor Weinsanto, également créateur, Vincent Garnier Pressiat développe sa première collection pendant le confinement.
Bien que le noir demeure la teinte préférée du designer, Vincent Garnier Pressiat propose également des ensembles avec des imprimés flamboyants associés à des bottes lacées à plateformes surdimensionnées, des bodys et robes ultra sexy, ainsi que des vestes dotées d'épaules imposantes. Ces silhouettes fusionnent artisanat et références historiques, de l'époque victorienne aux Années folles, en passant par le glam rock et les seventies. Un style baroque et genderless déjà présent dans sa première collection, "Diamant de nuit".
Victor Weinsanto
Victor Weinsanto, fondateur et directeur artistique de la marque éponyme, a su faire ses preuves en seulement 3 ans. Victor Weinsanto a étudié la danse classique, se produisant notamment à la John Cranko Schule de Stuttgart. Après avoir réalisé son désir de devenir créateur de mode, il se forme à l'École Atelier Chardon Savard à Paris, où il découvre "le plaisir de s'amuser avec les vêtements". Il fait ses débuts aux côtés du couturier Jean Paul Gaultier, où il apprend le savoir-faire, l'artisanat et la liberté dans son processus créatif. En 2020, il lance sa propre ligne dans laquelle il intègre son amour pour les arts du spectacle avec des défilés ludiques, colorés et sur le thème du cabaret. Il puise son inspiration dans le divertissement et l'art en général. Les mannequins de ses défilés sont souvent des muses et des amis issus de différents horizons créatifs tels que la danse, le théâtre et le cabaret. Il s'inspire également de l'histoire, de l'architecture et de la musique.
Portée par une espièglerie distincte, la marque propose des défilés singuliers, caractérisés par des scénographies atypiques en contraste avec des décors délaissés. L'attention portée aux détails est la clé, le designer s'inspirant de la personnalité de chaque modèle pour concevoir sa tenue. Il crée ainsi une troupe de créatures jouant des rôles semblables à ceux d'une pièce de théâtre, exprimant leurs personnalités et donnant vie aux vêtements. Dans les coulisses de ses défilés, il offre aux étudiant·es en école de mode l'opportunité de participer en tant que petites mains, créant ainsi une chance unique de partager leur sens créatif commun.
Victor Weinsanto excelle également dans l'art de la démesure, proposant des pièces XXL, des coiffes grandioses et des silhouettes liées par des tresses. N'oubliant pas son héritage alsacien, il lui rend hommage avec la collection intitulée “Hopla Geiss”. Dans cette collection, il modernise le tissu kelsch en version rose et propose une scène où un mannequin dévore un kougelhopf caché dans un sac.
Ellen Hodakova Larsson
Lancée il y a deux ans, la marque Hodakova, créée par la jeune designer suédoise Ellen Hodakova Larsson, explore la durabilité de la mode à travers des créations avant-gardistes qui repoussent les frontières de l'upcycling. Ellen a grandi dans une ferme équestre près de Strängnäs, en Suède, à environ une heure à l'ouest de Stockholm, où elle réside actuellement. Sa mère, couturière spécialisée dans la réparation de fourrures, était ingénieuse et transformait des nappes en robes. À 31 ans, elle semble avoir hérité de cette ingéniosité. Après avoir obtenu son diplôme de l'École suédoise du textile, Ellen fonde sa marque durable Hodakova. Elle déconstruit et récupère des vêtements d'occasion ainsi que des accessoires vintage, sauvant souvent des pièces de saisons précédentes et des chutes de grandes maisons comme Gucci. Ces contraintes matérielles donnent naissance à des réinterprétations de pièces essentielles de la garde-robe, comme des tailleurs souples et ajustés, ou des sacs en cuir fabriqués à partir de ceintures tissées, qui sont à la fois ludiques et sculpturaux.
En optant pour des matières de qualité issues de vêtements déjà existants et de stocks dormants, la jeune créatrice donne vie à des pièces chargées de signification. Rien n'est laissé au hasard dans son processus créatif, et chaque vêtement revêt une fonction spécifique. Avant de concevoir une collection, elle se questionne sur le but et l'utilité de sa création. En transformant d'anciens vêtements en pièces contemporaines, la marque se veut à l'avant-garde du changement dans la façon de consommer. À travers ses nombreuses pièces uniques, la créatrice vise à redéfinir la relation avec le vêtement et surtout à forger une nouvelle perception du monde qui nous entoure en redéfinissant le concept d'intemporalité.
Rachel Scott
Rachel Scott perçoit la mode comme un moment d'union intellectuelle, esthétique et corporelle qu'elle s'engage à explorer. Forte d'une expérience à tous les niveaux du processus créatif, de styliste à consultante, Rachel Scott apporte à Diotima l'ensemble de ses connaissances techniques et créatives. Son passage chez Costume National a jeté les bases d'une approche qui privilégie le respect de l'artisanat, du travail méticuleux et des matériaux nobles. En tant que Jamaïcaine, sa sensibilité au design ancre son travail au carrefour de l'histoire, de la politique et de la beauté. Avec Diotima, Rachel aborde des thèmes complexes liés à la race, au genre, ainsi qu'à notre relation avec le travail et la main-d'œuvre. Au fil des mois, la créatrice développe un lexique qui s'éloigne des clichés parfois entretenus par la mode occidentale sur la culture caribéenne.
En seulement quatre collections, mêlant des tailleurs inspirés du vestiaire masculin des années 90 à des pièces plus suggestives comme des tops en résille doublés de soie ou des longues robes moulantes en crochet à porter sans soutien-gorge, Diotima a construit un nouvel univers sensuel et sophistiqué. Celui-ci trouve son inspiration dans ce que la créatrice, formée à l'Institut Marangoni de Milan, appelle sa "sainte trinité" : les lignes architecturales d'Alaïa, l'allure chic et décalée de Prada et l'attitude punk de Vivienne Westwood. Cette passion ardente pour mettre en valeur les particularités de la Jamaïque avec Diotima a valu à Rachel Scott une place de finaliste au prix LVMH 2023.
Satoshi Kuwata
Satoshi Kuwata, le fondateur de Setchu, a parcouru le monde, accumulant un savoir-faire unique dans le domaine des traditions visuelles. Ayant résidé à Kyoto, Paris, Milan, Londres et New York, il a développé une approche singulière de l'élégance ainsi qu'une connaissance et un respect profonds des différentes cultures et de l'artisanat sous toutes ses formes. Sa philosophie du style s'est affinée au sein de studios de design internationaux et en tant que directeur de la création. Tout au long de sa carrière, il a collaboré avec des marques telles que Givenchy, Edun, Kanye West et Gareth Pugh, tout en cultivant un sens aigu de la couture au sein d'institutions prestigieuses comme Huntsman & Sons. Setchu présente des collections harmonieuses et élégantes conçues pour un style de vie actif et en plein air.
Lauréat du prix LVMH 2023, Satoshi Kuwata élabore une mode à la fois sobre et affûtée, fusionnant sa maîtrise de la coupe et du tailleur acquise à Savile Row avec une approche ultra-précise de la construction et du patronage, influencée par l'art de l'origami et la géométrie. À travers ses collections successives, la philosophie de la marque se concrétise dans des pièces modulables qui allient confort et précision. Ces créations explorent la fluidité des matériaux, jouant avec leur nouage, leur assemblage par des boutons, des superpositions et des plissages qui structurent les silhouettes par des lignes fortes, évoquant l'image d'une feuille de papier pliée à plusieurs reprises. Tourné vers l'avenir et la planète Mars, le créateur évoque sa passion pour la pêche et le vêtement, ainsi que les origines du nom Setchu, qui signifie "compromis" en japonais.
Grace Ling
Née à Singapour et actuellement basée à New York, Grace Ling a étudié le design de mode à la Parsons School of Design à New York et à Central Saint Martins à Londres. Pendant son séjour là-bas, elle a travaillé pour des marques renommées telles que Thom Browne et The Row. Avant de se spécialiser dans la mode, Grace a également étudié la sculpture et l'art de la performance. Cela a alimenté sa volonté de créer une mode polyvalente, impliquant souvent le cinéma, la performance et la collaboration.
GRACE LING repose sur un sens de l'élégance excentrique et de la féminité intelligente. Il s'agit d'une marque de mode fondée sur l'impression 3D et la technologie CGI. Fusionnant la technologie avec des méthodes traditionnelles d'artisanat permet de créer des formes uniques sans aucun déchet. Reconnus visuellement pour ses pièces métalliques imprimées en 3D et ses silhouettes sculpturales, les designs GRACE LING sont des pièces intemporelles et durables mettant l'accent sur des matériaux de qualité. La marque se revendique comme un uniforme pour les personnes modernes et cultivées - un style de vie et un esprit spirituel qui entretiennent un dialogue continu avec le monde de l'art et de la durabilité.
Didu
Fan de Margiela et Antwerp Six, la designer aspirait à une approche plus extravagante et conceptuelle du design que dans sa Chine natale. Après avoir obtenu son diplôme de design de mode à Beijing, Di Du choisit l'Académie royale des beaux-arts d'Anvers pour poursuivre ses études. Une fois diplômée du département de mode, Di Du lance sa marque éponyme qui se développe actuellement entre Paris et Shanghai.
Axée sur les formes et les coupes, les techniques et les tissus durables, DIDU présente des collections féminines qui cherchent à unir le vêtement moderne à des émotions fortes. DIDU apporte une touche super féminine, de la subversion et du futurisme pour les femmes. Dans ses collections, le genre, la société et l'égalité sont le manifeste immuable. DIDU intègre les cultures orientale et occidentale dans une tentative de briser les frontières d'un seul concept culturel. C'est une sorte d'amour-propre et d'auto-acceptation pour les femmes d'exprimer courageusement leur corps. DIDU donne pleinement aux femmes l'occasion de montrer la beauté du corps et les encourage à s'exprimer avec confiance.
Karoline Vitto
Originaire du Brésil et établie à Londres, la créatrice Karoline Vitto réinvente les normes de la mode. Après ses études à la prestigieuse école Central Saint Martins et au Royal College of Art, Karoline Vitto entreprend sa carrière dans le domaine de la mode, soutenue par l'incubateur de jeunes talents Fashion East. A travers sa marque éponyme, elle met en avant le corps et toutes les facettes de la féminité. Axée sur l'inclusivité et l'utilisation de matériaux responsables, elle conceptualise, depuis 2020, une collection confectionnée sur demande à Londres, proposant des tailles allant du 36 au 56.
En matière de design, la créatrice apprécie travailler avec la malléabilité et la matérialité du jersey, notamment avec l'ajout de métal. La sensualité règne en maître dans ses collections, magnifiant chaque silhouette, notamment à travers un détail distinctif : un lien en métal argenté, qu'elle a exploré pour la première fois au Royal College of Art. Une palette de couleurs audacieuse, allant du noir au bleu vif en passant par un rouge flamboyant, et toujours ces détails bijoux empreints de concepts... Aucun doute, avec des pièces immédiatement reconnaissables, Karoline Vitto a véritablement trouvé sa signature dans le monde de la mode.
2024 promet d'être une épopée fascinante, guidée par des esprits visionnaires. Ces dix créateurs, avec leurs parcours uniques et leur travail avant-gardiste, incarnent la diversité et l'innovation qui définiront l'année à venir.
Que vous soyez sensible à la durabilité, l'expérimentation artistique ou encore la redéfinition des normes de genre, ces créateurs offrent un voyage captivant à travers les horizons de la créativité.
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