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Ida B.

Rap & Variété : une relation passionnelle

Malgré des ventes faramineuses et des certifications SNEP à la pelle, les médias généralistes restent sceptiques et résistent à l’idée que le rap, cette musique “”urbaine””, puisse devenir le genre musical le plus écouté en France.


Quand on compare le nombre de certifications et le nombre de récompenses des artistes du Top France, on en vient à se demander si les décideurs ne prendraient pas en compte leurs goûts personnels plutôt que l’opinion publique (S/O à Booskap, Yard et Smile pour Les Flammes, enfin une cérémonie à la hauteur).


L’émergence du rap dans l’industrie musicale est vue comme une menace par certains. Le Point titre d’ailleurs “Comment le rap a phagocyté la variété française”. Alors on voulait rendre hommage à cette relation passionnelle qui lie le rap et la variété française. Cette histoire d’amour entre deux genres que tout oppose : l’un, contestataire et subversif, l’autre édulcoré et lisse.




Une histoire d’affront


En 1993, c’est Supreme NTM qui donne le ton : “La varièt' nous prend la tête, que ces bâtards prennent leur retraite”. Le rap se veut contestataire et provocateur contrairement à la variété plus légère. 26 plus tard, PNL en rajoutera une couche “jsuis du hall, jsuis du bâtiment, la variét je la baise”.

Paradoxalement, alors que le rap rejette tout un pan de la musique française, il revendique tout de même le noble héritage de la variété française. Tout rappeur a grandi avec Brel, Brassens ou Renaud. Booba lui emprunte d’ailleurs un sample dans Pitbull et dans Le Bitume Avec Une Plume, ses classiques.




Une histoire de maille


Au milieu des années 2000, quand le rap passe du statut de genre marginal à musique populaire, nombreuses sont les maisons de disques ayant senti le vent tourner. Certains artistes ont rapidement compris que l’ouverture à la chanson plus classique peut s’avérer rentable. Dès 2010, on a été submergé de feat. improbables à la direction artistique plus que douteuse. On pense à Mokobé x Arielle Dombasle ou encore Canardo x Joyce Jonathan.




Une histoire d’hommage


Aujourd’hui, le rap rend hommage à la variété en se réappropriant ses codes. Que ce soit dans le sample, les toplines ou encore en interview, les rappeurs clament leur amour pour la chanson française. En effet, plus question de street crédibilité mais d’univers et de musicalité. Et c’est de manière totalement décomplexée que les artistes puisent désormais leurs inspirations dans le répertoire passé.




Une histoire d’univers


L’influence de la variété française sur le rap est sensible de manière universelle. Mais ce clin d'œil est d’autant plus appréciable quand il est justifié, notamment lorsque c’est pour aborder des thèmes similaires ou partager la même émotion.



Retour sur 5 hommages du rap à la variété française :

  • Ce que je vois, de Jul

Dans ce son aux tendances cloud, le gimmick répété en fond est un sample de “Ella, Elle l’a” de France Gall. Le ton mélancolique qu’adopte Jul tout au long du morceau est nuancé par le l’air enjoué de France Gall. Alors que “Ella, Elle l’a” est une chanson de protestation contre le racisme et un hymne à l’empowerment, Jul répond qu’il vit dans un autre monde, un monde de faux semblants et de répression.


  • Les autres, de Abd Al Malik

Dans ce son, Abd Al Malik emprunte le flow de Jacques Brel dans “Ces gens-là”. Le clin d'œil est réfléchi et assumé, puisqu’on retrouve également ce sample dans la prod et le titre qui est clairement synonyme. Dans Les Autres, Abd Al Malik reprend les thèmes et la narration de Ces gens-là en l’adaptant à son environnement.


  • Les derniers marioles, Soso Maness

Ce son est la première collaboration entre les deux rappeurs marseillais, Soso Maness et SCH. Comme à chaque collaboration, Soso Maness cherche le compromis avec son invité. C’est tout naturellement qu’il pense à Colette Renard et sa reprise du titre de Barbara “Tais-toi Marseille”. Le choix n’est donc pas anodin puisqu’il représente le point commun entre les deux artistes : Marseille.


  • La ballade du frémont, Nekfeu

Le refrain de ce son en feat avec Doums n’est emprunté à nul autre que Brassens. Nekfeu reprend le refrain de “La mauvaise réputation”, chanson dans laquelle Brassens manifeste son opposition à la société. Thème récurrent dans la discographie de Nekfeu.


  • What’s the difference, Dr Dre

Dans ce feat avec Eminem et Xzibit, Dr Dre sample “Parce que tu crois” de Charles Aznavour. La chanson d’Aznavour étant une chanson de rupture, l’utilisation de ce sample permet de marquer la rupture entre Xzibit, Dre et Em, et les autres rappeurs. Et cet emprunt ne déplaît pas à son auteur. Charles Aznavour, grand défenseur du rap, avait d’ailleurs déclaré au Parisien “La chanson française est faite de textes (...) Il faut donc faire rentrer dans notre famille ceux qui travaillent le texte”.

L’influence de Charles Aznavour s’étendait bien au-delà des frontières françaises : LeBron James a déclaré, lors de son interview dans Clique, être fan du grand Charles.



Alors qu’il y a encore quelques années la FF clamait “Nique la musique de France” comme un cri de guerre, la colombe est passée et il est bon de créer des ponts plutôt que de les bombarder : “Rap ou variété, moi j'mélange les deux” dit désormais Jul. D’ailleurs, on n’est pas à l’abri d’un feat entre Michel Polnareff et le J. Et les clins d'œil à la variété sont divers, à l’instar du feu Luv Resval qui choisit une photo de France Gall comme photo de couverture sur Twitter.

La créativité réside dans le fait de pouvoir se réapproprier ce qui a déjà été créé auparavant. Et puis, savoir qu’un rappeur chantonne les mêmes airs qui ont bercé notre enfance crée un lien de proximité.


Et toi, t’en penses quoi de la relation entre le rap et la variété?


Si ça t’intéresse de trouver les samples cachés dans tes sons préférés, on t’invite à visiter le site WhoSampled?

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