Plongeons dans l'univers énigmatique et captivant du chef-d'œuvre de Johannes Vermeer, "La Jeune Fille à la Perle" (1665). À travers cette exploration artistique, nous décrypterons les subtilités et les mystères impénétrables derrière ce tableau. Une invitation à dévoiler les secrets artistiques qui font de cette toile un trésor intemporel de la peinture néerlandaise du XVIIe siècle.
Qui était Vermeer ?
Né à Delft dans une famille calviniste, Vermeer a vécu toute sa vie dans cette ville de l’ouest des Pays-Bas. Né Joannis Reynierzoon, l’artiste change son prénom en Johannes et adopte le pseudonyme “van der Meer” - signifiant “du Lac” en néerlandais - contracté en “Vermeer”.
Fils d’un tisserand, aubergiste et marchand d’art protestant de Delft, il hérite des dettes de son père à l'âge de 20 ans. On ignore toujours qui fut son maître durant ses années d’apprentissage. Issue d'un milieu aisé, son épouse Catharina Bolnes et la mère de cette dernière lui permettront de se consacrer à son art. En peignant des intérieurs paisibles, Vermeer fuira un quotidien bruyant. Malgré 4 enfants morts en bas âge, l’artiste et sa femme en élèvent 11.
Élu à la tête de la guilde de Saint-Luc à l’âge de seulement 30 ans, il est très tôt un peintre respecté qui bénéficie de la protection de riches commanditaires. Mais sa notoriété régionale, contrebalancée par une production très lente – l’artiste n’aurait réalisé que 45 tableaux en vingt ans – et les dépenses exigées par ses nombreux enfants, ne suffit pas à le mettre à l’abri de graves difficultés financières, qui causeront sa ruine et sa mort à l'âge de 43 ans.
La signature Vermeer
Chez Vermeer, une délicate douceur s'infiltre dans la vie quotidienne solide et ordonnée de la Hollande bourgeoise.
À travers sa composition, sa lumière et ses couleurs, le peintre métamorphose des environnements intimes apparemment ordinaires en espaces mystérieux, parfois totalement hermétiques, grâce à des astuces uniques :
l’organisation de l’espace : une pièce close et intime, avec des obstacles au premier plan pour maintenir le spectateur à distance
une lumière unique : latérale, blanche et pure, émanant souvent d’une fenêtre située sur la gauche pour éclairer délicatement, et à demi, les objets et les personnages
des contours magiques : une impression de netteté générale, avec des objets parfois scintillants ou entourés d’un halo miraculeux
des pigments précieux et un sens de l’épure : Vermeer n’utilise qu’une vingtaine de pigments qu’il fabrique lui-même à partir de pigments onéreux, dont le bleu outremer obtenu à partir de lapis-lazuli (pierre précieuse venue d’Afghanistan) qu’il mélange à d’autres teintes pour diffuser son éclat dans toute l’œuvre.
des personnages impénétrables : souvent féminins, ses personnages sont calmes, absorbés par une activité délicate et hors d’atteinte du spectateur.
Sa marque de fabrique est son association du bleu outremer au vibrant jaune de Naples. Astucieux, car si le jaune accroche l’œil et instaure une ambiance chaleureuse, sa combinaison avec le bleu rétablit l’équilibre tout en dynamisant l’espace par effet de contraste.
Bien que ses peintures soient divertissantes, descriptives et narratives, Vermeer ne se limite pas à être un simple artiste d'anecdotes. Ses scènes de genre véhiculent une morale, ou du moins, une dimension allégorique. Le spectateur est invité à décrypter ces messages en analysant divers objets symboliques parsemés comme des indices à travers la toile.
“Il est le peintre le plus clair, le plus transparent qui soit au monde, et que l’on pourrait appeler le contemplateur de l’évidence.” disait Paul Claudel, dramaturge français du XIXème siècle.
Décryptage de ‘La jeune fille à la perle’ (1665)
La jeune fille nous lance un regard énigmatique par dessus son épaule : ses yeux clairs et limpides expriment une grande pureté, mais semblent également légèrement implorants voire empreints de désir.
Humides et entrouvertes, les lèvres roses de la jeune fille s’imposent comme l’élément le plus sensuel du tableau. Le peintre les représente avec un réalisme virtuose en soulignant leur arrondi et leur brillance avec une pointe de blanc qui fait écho à ses yeux lumineux et à la perle luisant à son oreille…
Représentant la délicatesse, la pureté et la virginité, cette perle cristalline qui reflète le col blanc de la jeune fille n'est en réalité qu'une larme de verre recouverte d'émail ou d'argent poli. Une perle authentique de cette taille aurait nécessité une somme astronomique à six chiffres pour être acquise !
Noué avec élégance autour de sa tête, le turban jaune et bleu rappelle la parure exotique d'une odalisque, accentuant ainsi l'érotisme de la peinture en dissimulant les cheveux de la jeune fille. Il contribue également à brouiller les pistes quant à son identité, conférant à l'ensemble une allure universelle et intemporelle.
Ce fond noir contraste de façon saisissante avec sa peau lumineuse. Cependant, des analyses récentes effectuées en infrarouge ont révélé que le fond était à l'origine un rideau vert, devenu plus sombre au fil des siècles.
“Il y a tant de mystère dans chacune de ses peintures, et chez les femmes qu’il représente, tant d’histoires suggérées sans être racontées.” selon Tracy Chevalier, auteure de La jeune fille à la perle (1999).
Tombée dans l’oubli durant près de deux siècles, La jeune fille à la perle est aujourd’hui l'œuvre la plus célèbre de Vermeer. À la fois très sensuelle et d’une innocence confondante, la beauté pure de la jeune fille à la perle ne cesse de fasciner, et d’alimenter les spéculations.
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